La Vie d'Oyasama selon la vision du temps moderne
Première partie : Avant de devenir le Temple de Tsukihi

Avant de commencer

Si vous n'avez pas lu le livre de la Vie d'Oyasama, il est difficile de comprendre de quoi je parle ici. Contactez-moi pour vous en procurer. Ces commentaires sur la Vie d'Oyasama ont été succesivement publiés sur papier depuis novembre 2011. Mais je continue la suite ici sur ma page d'internet. Ainsi, tout ce qui est écrit ici est mon interprétation personnelle mais elle est fondée sur la doctrine authentique enseignée au Japon.

I, le sens de ses premiers quarante ans

3. Après le mariage
3.3 Incident Kano (vers 1817, Miki avait alors vingt ans)
Quand on parle de Miki en tant que femme responsable de la famille Nakayama, cet incident est l’un des épisodes les plus fréquemment cités.

L’histoire est comme suit : Une des servantes, appelée Kano, qui jouissait des faveurs du mari de Miki, eut de jour en jour une conduite plus arrogante à l'égard de Miki, si bien qu'elle finit par lui mettre du poison dans son potage en calculant que si Miki mourait, elle prendrait sa place. Sans ne se douter de rien, Miki avala le potage et fut aussitôt prise de violentes douleurs. Sa famille finit par découvrir que la servante en était responsable et exprima aussitôt stupéfaction et colère, mais Miki murmura d'une petite voix: «Ce sont les dieux et le Bouddha qui ont voulu nettoyer mes entrailles.» Et calmant tout le monde, elle pardonna à la servante qui, touchée par ce cœur magnanime, en exprima un profond regret, un repentir sincère, puis d'elle-même prit congé.(1)

Se montrant tolérante vis-à-vis de la coupable, Miki reconnut son défaut qui mérite selon elle un tel traitement. Cette indulgence incomparable de sa part devrait manquer à nos contemporains qui n’arrêtent pas de critiquer les autres même pour une faute commise par eux-mêmes.

Nous considérons que la recherche de la cause du mal en soi est souvent dommageable car elle peut faire perdre la confiance en soi. Certes, la reconnaissance de nos erreurs est tellement douloureuse que cette souffrance pourra nous mettre dans un spiral infernal. Miki avait peut-être tort quelque fois : elle a donné ses beaux vêtements à Kano, accompagnatrice à sa place lorsqu’elle ne pouvait pas sortir avec son mari apprécier les fleurs de pivoines par exemple(2). Cependant, il n’y aurait eu ni culpabilisation ni rancœur chez elle et sa déclaration représentait littéralement ce qu’elle avait senti. Du moins, elle aurait essayé de penser ainsi alors qu’elle avait le droit légitime en tant que femme du maître de la maison de condamner plus sévèrement l’empoisonneuse. Kano ne s’est pas fait expulser de la maison mais prit congé d’elle-même car elle, se rendant compte de sa faute, ne voulait plus y rester du fait de son mea-culpa. Ce fut donc grâce à la force mentale de Miki que s’est résolu le problème qui bouleversa les Nakayama(3). Il nous arrive parfois que nous réussissons bien les choses très intelligemment alors que nous sommes dans une situation pressante et affolante. Miki fut bizarrement sereine dans un état critique comme si le mal l’a confortée au point de pouvoir se contrôler.

La façon dont elle lui pardonna paraît un brin idéaliste pour certains. Selon eux, elle devait avoir éprouvé de la haine ou tenté de la dissimuler car en vérité, ce que Miki subit, c’est l’humiliation ultime pour une femme. Cependant, au lieu de faire semblant d’être clémente, elle chercha à trouver l’origine du mal qui l’a fait souffrir d’une telle réalité. Si les dieux et le Bouddha ont nettoyé ses « entrailles », ce fut simplement un mal pour un bien à son sens. On y trouve déjà chez elle une véritable tolérance qui s’est également manifesté soixante-dix ans plus tard en qualité de Temple de Dieu au moment de ses incarcérations répétées : sans accuser ses proches qui ne la comprenaient pas, elle se servait de ses épreuves pour les emmener à un plus haut niveau de spiritualité(4). Bien évidemment, il n’est pas certain que Miki eut l’intention de donner des leçons à la fautive contrairement à Oyasama qui se chargeait de nous laisser le Modèle à suivre.

Or, si quelqu’un commet une faute, il faudrait la redresser pour lui. Mais parfois il ne vous écoute pas, bien que vous ayez complètement raison. C’est parce que vous n’avez malheureusement pas de mérite nécessaire pour vous faire écouter. Dans ce cas-là, vous ne prétendez plus faire le bien pour lui mais continuez vos sincères efforts afin qu’il devienne attentif à vos paroles. La meilleure des façons serait d’amener cette personne à comprendre par le cœur, de la convaincre de ce que vous voulez lui transmettre sans dicter clairement. Pour cela, vous êtes invités à travailler spirituellement sur vous-mêmes, à rester calmes face à n’importe quelles réactions de l’autre. Je ne dis pas de ne rien dire pour faire comprendre. La communication verbale est un moyen important. Pourtant s’ils ferment les oreilles, votre message ne passera jamais. L’écoute spirituelle n’est donc pas une formalité auditive mais une ouverture réalisée par la maturation d’esprit. Le cœur de Miki d’alors aurait été justement celui qui puisse inviter l’autre à changer par lui-même.

Yamochi a employé le terme « agapè » pour expliquer cet état d’esprit de Miki(5) mais je pense qu’il est extravagant d’associer cet amour universel à son acte car cela ne me semble pas du tout l’amour désintéressé qu’elle témoigna mais le retour sur soi par lequel elle pouvait se montrer indulgente, et qui aurait ému le cœur de la malheureuse bonne.

1 Voir La Vie d’Oyasama, p.p.10-11. Dans la citation, j’ai remplacé « Oyasama » par « Miki ».
2 Yamochi Tatsuzo, 教祖伝入門十講 Dix discours d’initiation sur la Vie d’Oyasama, Tenri, Doyusha, 1984. p.59.
3 Hamada Taizo, 天理教‐存命の教祖中山みきTenrikyô-Fondatrice vivante Miki NAKAYAMA, Tokyo, Kodansha, 1985, p.46
4 ひながたを温ねるApprendre le Hinagata, Tenri, Doyusha, 1987, p.162.
5 Yamochi Tatsuzo, ibidem. p.p.58-59.

(publié en mai 2013 au bulletin trimestriel de Tenrikyô)