La Vie d'Oyasama selon la vision du temps moderne

III, Temple de Tsukihi

5, «Enseigner la couture.»

A partir de l'année 1848, à la Résidence, Oyasama commença à enseigner la couture aux jeunes filles du village. Elle prit des élèves pendant plusieurs années mais certains précisent que l'apprentissage fut dispensé seulement entre 1848 et 1852(1).

Pour autant, Oyasama ne faisait pas cela dans le but de gagner de l’argent. Il était important pour elle de montrer qu'elle n'était pas atteinte de démence et qu'elle pouvait totalement s'adapter à la vie humaine malgré son caractère sacré. Au même titre, Shûji, son fils aîné, fonda à la résidence une école pour apprendre aux enfants à lire et à écrire.

Pendant les dix années qui suivirent la Révélation, les gens préféraient éviter tout contact avec la famille Nakayama. Pourtant, dès qu'elle annonça qu'elle allait prendre des élèves, les villageois, sachant qu'elle était douée d’une adresse exceptionnelle dans le domaine de la couture, commencèrent à envoyer leurs filles chez elle. La maison qui était demeurée presque sans vie se transforma tout à coup en un lieu où l’on entendait les enfants éclater de rire.

Ces activités servaient donc non seulement à renouer des relations avec le voisinage qui étaient devenues mauvaises mais aussi à redonner de la la vitalité à la maison et aux membres de famille en détresse. Ils étaient tellement déprimés par la perte des biens, de la fortune, et surtout par l’absence de relations humaines. Mais avec cette joie venant de la communion rayonnaient des espoirs pour la suite.

Parmi ses élèves, il y avait une certaine Koyo qui y côtoyait Oharu, fille d'Oyasama. Elles s'appréciaient beaucoup. Par conséquent, Koyo proposa à Oyasama de marier cette jeune demoiselle avec son cousin, surnommé « bouddha » en raison de son naturel aimable et très droit(2). Cette union, célébrée en 1852, revêtira une importance particulière : leur troisième garçon deviendra plus tard le premier Shimbashira. Si bien que ces activités ne furent point anodines dans l'histoire de Tenrikyô.

À l'époque, même si la famille Nakayama possédait encore des terrains et des propriétés, ils n'avaient plus le même poids qu'avant car les actes d'Oyasama rencontraient l’incompréhension des gens. Ce mariage d'Oharu fut donc révélateur en ce sens qu’il permit d’évaluer le changement des regards portés sur sa famille. C'était le témoignage d'une reconquête de la confiance auprès des voisins par le truchement des services rendus aux villageois après la décennie passée de disette et de défiance.

Toutefois, les activités de couture et d’école prirent fin au bout de quelques années. Nous savons que ni Oyasama ni son fils ne les avaient entreprises pour vivre. Que signifie alors la cessation de ces activités alors qu’elles avaient été couronnées de succès ?

Il s'agit de toute façon d'une étape vers l'objectif qui est la Vie de Joie. La première décennie d'aumône et d'isolement, considérée par les voisins comme des actes de folie, était nécessaire pour faire comprendre que son Enseignement était quelque chose d'extraordinaire à l'échelle universelle. Pourtant, il fut révélé pour le monde extérieur. Oyasama se devait de le lui faire comprendre un jour. C'est la raison pour laquelle elle fît en sorte que les relations fortement détériorées avec le voisinage deviennent de nouveau saines et apaisées. Ce n'était pas un retour en arrière mais au contraire un pas vers l'avant en vue d'un nouveau but. La destruction amena une nouvelle construction. Une fois les relations sociale bien restaurées à nouveau, les activités de couture et d'école touchèrent à leur fin. Oyasama changea alors de dimension : enseigner le Salut.

Cet épisode d’enseignement de la couture nous rappelle également que nous ne devons pas nous confiner dans un monde qui est le nôtre mais devons aller à la rencontre des autres pour entrer en harmonie avec eux malgré les différences. Les vérités qu’inculque Oyasama sont distinctes de celles que détenaient les voisins. Mais en dépit de cette différence, elle n’en tient jamais le monde écarté. Notre vie de Tenrikyô ne consiste pas à rejeter les valeurs étrangères mais à rapprocher la joie de vivre des uns pour les autres quelques en soient les écarts.

La première décennie du Modèle étant douloureuse et incompréhensible pour ses proches, ces cinq années suivantes, paisibles, marquèrent le rapprochement entre la Résidence et ses voisins. Après la tempête vint le calme.

Or, après le calme, reviendra encore la tempête. En effet, la famille rencontrera de nouvelles épreuves. Oyasama arrête les activités d’enseignement, paraîtrait-il, en prévision d'un tournant : Zembei, son mari, décède en 1853. Après sa mort, Oyasama ordonne la destruction de la maison principale, et pis encore pour les membres de famille, elle met tous ses terrains en gage. La situation redevient critique. Mais aux yeux humains seulement. Pour Oyasama, cette deuxième tempête, beaucoup plus spirituelle que matérielle, que nous étudierons au numéro prochain, entame la vraie Voie religieuse propre à Tenrikyô. Quinze années s’étaient déjà écoulées depuis la Révélation.

1 Yamochi Tatsuzo, 『教祖伝入門十講』 Dix discours d’initiation sur la Vie d’Oyasama, p.98.
2 Anecdotes sur la Vie de Joie, No 6.

(publié en février 2016 au bulletin trimestriel de Tenrikyô)